Au pouvoir et enceinte : le tabou. Téva. Samedi 24 mai. 22 h 45
Elles ne sont pas issues des mêmes partis politiques, elles ne mènent pas les mêmes combats, n’exercent pas les mêmes responsabilités, et pourtant elles ont un point commun : la réalisatrice Saveria Rojek donne la parole à cinq femmes politiques qui ont vécu leur grossesse alors qu’elles étaient députées, ministres ou secrétaires d’État. Cinq femmes d’aujourd’hui, qui montrent le chemin à parcourir pour parvenir à l’égalité avec les hommes, tant les situations qu’elles ont vécues sont folles et injustes. Et si des femmes, à la tête du pouvoir, sont aussi maltraitées, comment peuvent-elles être respectées, dans leurs droits et leur envie de devenir mère, dans le reste de la société ?
On peut ne pas partager, et tant s’en faut, les combats de ces femmes. Mais ce qu’elles racontent d’une grossesse, vécue entre 2020 et 2023, dans le monde politique, est hallucinant. Toutes ont vécu ce moment sous tension : Aurore Bergé, de la majorité présidentielle, enceinte au moment de la campagne des élections législatives de 2022, a préféré le cacher, par crainte d’être désavantagée auprès des électeurs, mais aussi de ses collègues de l’Assemblée nationale, alors qu’elle voulait prendre la présidence de son groupe. Mathilde Hignet, de La France insoumise, assume son état durant cette même campagne, persuadée qu’elle sera remplacée, le temps de son congé maternité, par son suppléant. Elle tombe des nues lorsqu’elle apprend que rien n’est prévu, et qu’à moins de tomber malade ou de décéder, son suppléant ne peut pas la seconder dans ce moment si important de la vie. Olivia Grégoire, quant à elle, a 42 ans quand sa grossesse débute. Elle est secrétaire d’État. Elle vient de subir trois fausses couches. Son médecin lui balance une phrase terrible : « Mais il me semble que vous avez fait votre choix : mère ou ministre, il faut choisir ». Elle avoue que cette phrase l’a « détruite », même si, depuis, sa petite fille s’est invitée dans sa vie et celle de son conjoint. Idem pour Sarah El Haïry, du Modem, qui a assumé à la fois son homosexualité et son parcours de PMA, avec fierté. En retour, elle a hérité de milliers de messages d’insultes. Marlène Schiappa, elle, raconte comment, pendant une cérémonie officielle, elle s’est retrouvée debout, pendant plus d’une heure, alors qu’elle faisait une fausse couche et que sa robe était inondée de sang.
Le sujet est brûlant d’actualité : d’abord parce que 75 % des femmes estiment qu’une maternité ralentira leur carrière. Et ce n’est pas faux. Mais aussi parce que ces préjugés empêchent les femmes de s’investir en politique. « L’institution a été pensée par des hommes pour des hommes. La place des femmes, des jeunes femmes, en politique n’a pas été pensée. La grossesse ou la maternité, c’est un impensé », remarque Mathilde Hignet.
Si les femmes de pouvoir ne peuvent pas jouir de droits fondamentaux, qu’en est-il pour toutes les autres, moins privilégiées ? Le film, de bout en bout, pose la question. Aurore Berger considère que si les femmes font des enfants de plus en plus tard, c’est aussi qu’elles craignent, souvent à raison, hélas, une « mort sociale » et une « mort professionnelle ».
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