Daniel Bouy participe aux défilés du 1er Mai depuis qu’il a l’âge de 14 ans. Il en a aujourd’hui 67. Ce journaliste retraité, par ailleurs membre des Amis de l’Humanité, officiait lors de l’édition de 2021 comme membre de l’Observatoire parisien des libertés publiques, créé par la LDH et le Syndicat des avocats de France, lorsqu’il a été agressé par un policier de la Brav-M.
Une scène filmée par un manifestant qui laisse peu de doute sur l’intention du fonctionnaire, poursuivi ce mardi, devant la 10e chambre du tribunal correctionnel de Paris, pour « violence volontaire par personne dépositaire de l’autorité publique, sans incapacité de travail ».
« Un geste qui pose un problème politique »
« La violence physique peut être considérée comme légère par rapport à d’autres déjà vues en manifestation et je n’ai pas été blessé, convient Daniel Bouy. Mais ce geste du policier – peu importe son identité – pose un problème politique, car j’ai été visé comme observateur de la LDH, parce que j’étais en train de filmer l’action des forces de police. »
La volonté de sanctionner toute diffusion d’image de policier ou de gendarme constituait alors une des dispositions les plus contestées de la loi de « sécurité globale », portée par l’ancien chef du Raid devenu député LREM Jean-Michel Fauvergue et soutenue ardemment par Gérald Darmanin depuis la place Beauvau. « Il s’agit de protéger ceux qui nous protègent », justifiait le ministre de l’Intérieur en écho au syndicat de police Alliance.
Devant l’avalanche de critiques qu’avait soulevées cette mesure, du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme au Défenseur des droits, en passant par le Conseil de l’Europe, le gouvernement avait été contraint de réécrire son texte, puis avait vu la disposition purement et simplement censurée par le Conseil constitutionnel.
Dans leur décision du 20 mai 2021, les sages avaient estimé que l’article visé ne conciliait pas l’équilibre « entre les objectifs de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l’ordre public (…) et le droit au respect de la vie privée ». De fait, de nombreux cas de violences policières révélés par la diffusion de vidéos avaient montré l’utilité de ce type de document, notamment dans les affaires Benalla, Chouviat, Legay, Zecler, etc.
Des observateurs utilisés comme « boucliers » ? Le scénario ne tient pas
La vidéo que l’Humanité avait publiée dès le 4 mai 2021 ne fait pas exception : elle permet de voir que les observateurs de la LDH, qui agissent toujours en trinôme, étaient bien identifiables avec leurs casques bleu-vert et leurs grandes chasubles blanches. Devant les enquêteurs, le policier de la Brav-M avait argué avoir voulu interpeller un manifestant après le jet d’une canette et avoir trouvé Daniel Bouy sur son chemin.
Un scénario réfuté par les images qui n’a pas convaincu la justice. Celle-ci a estimé que la partie civile était « particulièrement reconnaissable » et que rien ne montrait que les observateurs de la LDH avaient été utilisés comme « boucliers ».
Ce qui apparaît en revanche dans le dossier judiciaire est que le fonctionnaire poursuivi a été mis en cause dans trois autres procédures pour violences instruites par l’IGPN, dont l’une pour un coup de poing asséné le 20 mars 2023 à un manifestant en marge d’une mobilisation contre la réforme des retraites. Des faits, eux aussi filmés, qui sont aujourd’hui entre les mains du parquet de Paris.
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